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District sanitaire de Baskuy : Rejetée par les agents de santé, Bachiratou Bikienga accouche au bord de la route

District sanitaire de Baskuy : Rejetée par les agents de santé, Bachiratou Bikienga accouche au bord de la route

Après avoir été rejetée à deux reprises du Centre médical urbain (CMU) du district sanitaire de Baskuy, Bachiratou Bikienga, une femme enceinte de 37 ans, a mis au monde son 8e enfant (une fille) au bord de la route, à un pas du centre médical. C’était le jeudi 1er octobre 2020, sous la pluie. Que s’est-il réellement passé pour que cette femme accouche dans de telles conditions ? Pour en savoir plus, Lefaso.net s’est rendu au CMU et au domicile de la nouvelle maman, sis à Nioko 1. Récit d’un fait insolite !

Bachiratou Bikienga habite le quartier Nioko 1 (arrondissement 10 de Ouagadougou). Elle est âgée de 37 ans et est mère de sept enfants. Le jeudi 1er octobre 2020, elle dit avoir quitté son domicile pour aller faire des achats au marché « Sankar-yaaré. » N’ayant pas trouvé ce qu’elle voulait dans ce marché, elle s’est rendue au grand marché de Ouagadougou, Rood-wooko. « Tout à coup, j’ai commencé à ressentir des douleurs au ventre. Je me suis renseignée sur le centre de santé le plus proche et on m’a indiqué le centre urbain. Ma compagne et moi, nous y sommes allées. Une fois arrivées au centre, j’ai expliqué mon mal mais l’agent de santé m’a simplement dit que la maternité n’est plus fonctionnelle et qu’il est préférable que je me rende à la maternité Pogbi (une autre maternité de Ouagadougou). Je suis ressortie mais une fois dehors, les contractions étaient plus intenses. Je suis retournée pour leur expliquer et ils m’ont dit de ressortir chercher un taxi pour aller à Pogbi. Quand je suis ressortie, arrivée au niveau du parking, j’ai senti le bébé venir, et puis un homme (le gérant de parking) est venu m’aider et on a appelé des femmes qui sont venues m’aider à accoucher. C’est à ce moment que les docteurs sont sortis avec les petits ciseaux pour couper le cordon ombilical.

Après, ils m’ont internée, et ils ont appelé l’ambulance. Quand l’ambulance est arrivée, ils m’ont dit que je dois payer 22 000 F CFA parce que j’ai accouché dans un taxi. Mais comme je ne comprends pas français, je ne savais pas ce que les agents de santé disaient aux ambulanciers. J’ai reçu la visite du médecin-chef du centre urbain de Baskuy, Léandre Kori. Il est venu nous présenter les excuses du district. Et comme l’erreur est humaine, nous leur avons accordé notre pardon », a relaté Bachiratou Bikienga.

« Ce n’est pas humain ! »

Forzias Nikiema est cette dame qui accompagnait Bachiratou Bikienga ce jour-là pour les achats au marché. Elle raconte pratiquement la même chose que son amie. Mais elle a toujours du mal à digérer le mal que les agents de santé ont fait endurer à sa copine. « Elle a donné naissance à sa fille au vu et au su de tout le monde, sous la pluie, au bord du goudron. Et pire, devant le centre de santé qui l’a rejetée à deux reprises. Vraiment, ce n’est pas humain ! », s’offusque la dame.

médecin-chef du district sanitaire de Baskuy, Léandre Kori

En outre, Forzias Nikiema affirme que les agents de santé ont délibérément décidé de cacher la vérité. En effet, ils auraient dit aux ambulanciers que Bachiratou Bikienga a accouché dans un taxi. « Faux, faux et archi-faux ! », lance-t-elle, avant d’ajouter : « Quand nous sommes arrivées au centre de santé, à deux reprises, les agents de la santé l’ont rejetée. Quand le bébé a commencé à venir, je me suis rendue au marché pour acheter des habits. C’est à mon retour que j’ai trouvé la femme dans l’ambulance. Pire, les agents ont menti aux ambulanciers en leur disant que cette dernière avait accouché dans un taxi et qu’ils l’ont internée avant de les appeler. Si j’étais là, j’allais leur dire que c’est faux, parce que s’ils le savaient, nous n’aurions rien payé ».

« Je demande aux autorités de veiller aux travaux que font leurs subalternes. Certes, il y a de bons agents, mais à côté, il y a des mauvais, (…). Sinon, comment une personne qui est entre la vie et la mort peut subir de telles atrocités de la part des gens qui ont prêté le serment de défendre des vies humaines ? », fulmine Saidou Kaboré, le mari de Bachiratou.

 

Une procédure administrative en cours pour situer les responsabilités
« Personnellement, je ne voudrais pas condamner quelqu’un. Pour l’heure, la procédure administrative suit son cours. Une lettre d’explication officielle a été demandée à tous les agents qui étaient présents au centre le jour des événements », a confié Léandre Kori, médecin-chef du Centre médical urbain de Baskuy. Il a fait savoir qu’il n’était pas présent au moment des faits, pour des raisons de service.

Saïdou Kaboré, époux de Bachiratou Bikienga, Forzias Nikiéma (accompagnatrice milieu) et Bachiratou Bikienga avec son bébé

Une fois alerté par ses collègues, il est arrivé au centre pour échanger individuellement avec ses agents sur cet incident. Ensuite, il a échangé avec les riverains dans le but de mieux comprendre. Enfin, trois raisons l’ont amené à se rendre à la maternité où se trouvait Bachiratou Bikienga. « Quand j’ai été à Pogbi, c’était pour souhaiter après tout la bienvenue au bébé et m’enquérir de son état de santé. Ensuite, avoir la version de Bachiratou sur les faits, leur présenter les excuses au nom du district. Mais cela ne veut pas dire que la procédure administrative ne suit pas son cours. Ce sont des humains comme nous. Une situation, quelle qu’elle soit, ne saurait expliquer qu’une femme accouche dans de telles conditions. Pire, au parking, devant notre structure », a expliqué Léandre Kori.

Puis d’ajouter : « Je demande à la population de comprendre que ce qui est arrivé ne nous honore pas en tant que personnel de la santé, mais aussi en tant que responsables de familles. Même si nous n’avons pas de maternité, nous ne sommes pas fiers que ce soit au parking, devant un centre de santé médical. Quand une information est passée, il faut éviter de jeter l’opprobre sur tout. L’administration a ses règles, donc il faut lui permettre de les faire appliquer ».

Dofinitta Augustin Khan (stagiaire)
Lefaso.net



06/10/2020
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