Le Zimbabwe en passe d'avoir une nouvelle Constitution
Le Zimbabwe est en passe de se doter d'une Constitution plus démocratique, au vu des premiers résultats d'un référendum tenu samedi, mais la participation a été faible et le climat est lourd de menaces, avec de nouvelles arrestations visant l'opposition au président Robert Mugabe.
Ce dernier devait s'envoler dimanche pour le Vatican, où contrairement à l'Union européenne, il n'est pas persona non grata, et doit assister mardi à la messe d'inauguration du pape François.
Dimanche, la police a confirmé l'arrestation à Harare de quatre assistants de Morgan Tsvangirai, Premier ministre de cohabitation depuis 2009 et principal adversaire politique de M. Mugabe. Ils sont accusés de s'être fait passer pour des policiers.
Un conseiller du Premier ministre, Alex Magaisa, avait auparavant annoncé l'arrestation de trois d'entre eux à leur domicile par des policiers en civils qui n'avaient pas donné d'explications mais avaient saisi des ordinateurs et un appareil photo.
En fin de journée, ils étaient toujours détenus tandis que la police a aussi perquisitionné leurs bureaux qui servent également de centre de documentation au Mouvement pour le changement démocratique (MDC), le parti de M. Tsvangirai.
Par ailleurs, l'association d'avocats Zimbabwean Lawyers for Human Rights a fait savoir que l'une de ses membres, Beatrice Mtetwa, avait été embarquée par un camion de la police.
Cette dernière a été arrêtée "pour obstruction au cours de la justice" et "après qu'elle a invectivé les enquêteurs durant la perquisition", selon une porte-parole de la police, Charity Charamba.
Mais un juge de la Cour suprême, Charles Hungwe, a ordonné la remise en liberté immadiate de Mme Mtetwa lors d'une audience extraordinaire.
"Le juge a ordonné sa libération immédiate de garde à vue", a indiqué à l'AFP Harrison Nkomo, membre de Zimbabwean Lawyers for Human Rights.
Ces incidents interviennent alors que le "oui" l'emporterait au référendum à plus de 90%, selon des résultats partiels. Le résultat définitif doit être publié d'ici cinq jours.
La participation s'est limitée à "plus de deux millions" d'électeurs, selon la Commission électorale zimbabwéenne (ZEC), qui avait fait imprimer des bulletins pour près de six millions de votants potentiels.
"Nous espérons que la paix qui prévaut actuellement va perdurer même après l'annonce des résultats", a déclaré lors d'un point de presse la présidente de la commission électorale, Rita Makarau.
Les observateurs de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC) , au nombre de 120, ont estimé dimanche que le référendum de samedi avait été "paisible et crédible" et constituait une "étape importante" sur la voie de la démocratisation du pays.
L'ambassade des Etats-Unis à Harare a elle aussi salué le déroulement du référendum, qui selon elle "a contribué à instaurer la confiance au sein du peuple zimbabwéen (...) et de la communauté internationale".
"Ce pas en avant historique dans le développement (au Zimbabwe) de la démocratie et de l'état de droit fait partie d'un processus important", a estimé l'ambassade dans un communiqué.
La nouvelle Constitution mettra notamment pour la première fois un frein au mandat présidentiel, limité à deux périodes de 5 ans, après 33 ans de pouvoir controversé de M. Mugabe, marqué dans la décennie 2000 par l'effondrement de l'économie, de graves violences politiques et des sanctions internationales depuis 2002.
Pretoria et Harare: des liens historiques
Le texte n'est cependant pas rétroactif et M. Mugabe, plus vieux chef d'Etat africain, entend en profiter pour se succéder encore une fois à lui-même.
S'il est réélu, ce que de nombreux analystes estiment possible, estimant que son camp n'est pas prêt à lâcher le pouvoir, il pourrait rester président jusqu'à 99 ans.
Un sympathisant du président, Reuben Sibanda, 38 ans, suggérait cependant un autre scénario dimanche: "Nous avons besoin que le vieil homme se retire et qu'une femme lui succède", a-t-il dit. Une allusion implicite à l'actuelle vice-présidente Joice Mujuru.
La capacité du pays à tenir des élections générales vraiment libres en juillet reste de fait incertaine.
M. Tsvangirai a exprimé sa crainte samedi d'une "résurgence de la violence" politique, suggérant que le pays n'était peut-être pas prêt. Ce sera aux médiateurs de la SADC, parrains du processus de réformes au Zimbabwe, d'en juger, a-t-il estimé.
L'Afrique du Sud pèse d'un poids important dans la SADC.
Or ces derniers jours, des responsables du Congrès national africain (ANC), le parti au pouvoir en Afrique du Sud, ont affiché leur soutien à M. Mugabe, au nom des liens historiques forgés dans la lutte pour renverser les régimes identiquement racistes qui régnaient au Zimbabwe jusqu'en 1980 et à Pretoria jusqu'en 1994.
M. Tsvangirai a beau être devenu Premier ministre en 2009, au sein d'un gouvernement de cohabitation imposé à M. Mugabe pour éviter une guerre civile, beaucoup de ses partisans ou de militants de la société civile continuent de vivre la peur au ventre.
Samedi, les opérations de vote s'étaient déroulées calmement, à l'exception notable de l'arrestation d'un responsable régional de l'opposition.
La veille, sept militants du MDC et une équipe de la BBC avaient été attaqués dans une township d'Harare, et ces dernières semaines plusieurs militants des droits de l'homme, avaient été inquiétés par la police et un meeting de M. Tsvangirai avait été interdit "par erreur".
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