Rebondissement dans le dossier d’extradition de François Compaoré : Le témoignage qui corrompt tout !
Ceci est une tribune de Me Paul Kéré. Cet écrit sonne comme un devoir pour lui d’éclairer l’opinion publique burkinabè et même internationale, sur ce qu’il qualifie de « fausses informations » répandues par le gouvernement sur la demande d’extradition de François Compaoré, désigné comme le principal accusé dans l’assassinat de Norbert Zongo, le 13 décembre 1998. Une procédure d’extradition qui serait même aujourd’hui « galvaudée par un faux témoignage » soutient Me Kéré.
En raison même des fausses informations distillées ça et là à travers les médias sur la demande d’extradition du Gouvernement burkinabè, il est vraiment nécessaire d’éclairer l’opinion publique nationale et internationale sur la procédure d’extradition initiée à l’égard de Monsieur Paul François COMPAORE, laquelle procédure d’extradition est aujourd’hui galvaudée par un faux témoignage aussi capital que déterminant d’un certain Monsieur Didas Rodrigue YAMEOGO.
Il convient de constater qu’un tel faux témoignage ne peut que conduire, dans un Etat « normal » de droit qu’à l’annulation pure et simple d’une telle procédure d’instruction et celle subséquente d’extradition, elle-même viciée par ce faux témoignage qui constitue l’ossature principale des poursuites infondées engagées contre Monsieur Paul François COMPAORE ;
C’est pourquoi, après avoir rappelé le contexte de cette demande d’extradition (I) et ce, malgré le caractère incontestablement politique d’une telle demande d’extradition, il conviendrait d’énoncer les raisons de l’annulation juridique de la procédure d’extradition en raison même du témoignage résultant du revirement spectaculaire de M. Didas Rodrigue YAMEOGO parce qu’il n’aurait pas, dit-il, « reçu la somme de 50 Millions de Francs CFA » qui lui avait été promise pour faire ce faux témoignage à charge (II).
I. Rappel du contexte de la demande d’extradition de François Compaoré auprès des autorités politiques françaises :
La demande d’extradition résulte d’une procédure spécifique régie par le Code de Procédure Pénale, tant en France qu’au Burkina Faso, Elle ne peut donc résulter d’une promesse faite par le Président de la République française, Monsieur Emmanuel MACRON, encore que la séparation des pouvoirs lui donne interdiction d’interférer dans les procédures judiciaires.
La procédure se déroule donc normalement et est actuellement pendante devant le Conseil d’Etat qui doit examiner le 18 Décembre prochain, une exception liée à la question préjudicielle de constitutionnalité qui n’est pas encore la question de fond relative à la demande d’extradition.
Ce n’est donc pas demain la veille que l’extradition de François COMPAORE aura lieu. Le dire est un éclairage juridique sur la demande d’extradition formulée par les autorités Burkinabè étant entendu que la procédure doit suivre normalement son cours.
Contrairement à la chambre de l’instruction de la Cour d’Appel de Paris ou de la chambre criminelle de la Cour de cassation française, toutes les questions de forme et de fond seront examinées par le Conseil d’Etat et je persiste à dire que l’extradition de Monsieur Paul François COMPAORE au Burkina Faso n’est pas juridiquement possible. Cela n’a rien à voir avec l’excellence des relations amicales entre le Burkina Faso et la France.
1. En rappel, dans le cadre de la procédure d’extradition initiée par note verbale de l’Ambassade du Burkina Faso à Paris, en date du 30 Octobre 2017, parvenue le même jour au Ministère français de l’Europe et des Affaires Etrangères et parvenue le 10 Novembre 2017 au Ministère français de la Justice et le 13 Novembre 2017 au Greffe de la Chambre de l’Instruction de la Cour d’Appel de Paris, le Gouvernement du Burkina Faso a sollicité l’extradition de Monsieur Paul François COMPAORÉ aux fins de l’exécution d’un mandat d’arrêt international délivré le 5 Mai 2017 par Monsieur Emile ZERBO, Doyen des Juges d’Instruction du Tribunal de Grande Instance de OUAGADOUGOU pour des faits non-imputables nullement à Monsieur Paul François COMPAORÉ « d’incitation à assassinats » commis à Sapouy au BURKINA FASO ;
Deux remarques préalables importantes :
1. Personne ne peut contester que le 13 Décembre 1998, le célèbre journaliste d’investigation, Norbert ZONGO a été trouvé calciné avec ses compagnons d’infortune à SAPOUY dans un véhicule de marque TOYOTA Land Cruiser et la Commission d’enquête étoffée par plus de 300 Pages n’a jamais établi une quelconque implication de Monsieur Paul François COMPAORE ;
2. Non seulement, la Commission d’enquête a abouti à l’absence d’implication de Monsieur Paul François COMPAORE, mais surtout, le Juge d’Instruction en charge de la procédure d’instruction ayant abouti à a demande d’extradition n’a jamais inculpé Monsieur Paul François COMPAORE même si le Procureur du Faso a indiqué récemment que celui-ci aurait été mis en examen dans ce dossier.
La nuance est de taille pour les initiés de la procédure pénale car, pendant longtemps, l’accès même à la procédure a été refusé aux avocats de François COMPAORE aux motifs légaux que celui-ci n’avait pas été inculpé ou mis en examen. La précision de Monsieur Le Procureur du Faso lors de sa récente conférence de presse prouve à suffisance que désormais, aucun refus d’accès à la procédure pénale n’est envisageable à moins d’un caractère politique de cette procédure d’extradition dont le support physique est invisible au Cabinet du Magistrat instructeur du Cabinet n° 4 ;
2. En effet, alors que dans le cadre de la dite même procédure initialement ouverte 17 ans auparavant en 1998 au BURKINA FASO, Monsieur Paul François COMPAORÉ qui avait simplement été entendu en qualité de témoin par le Juge d’Instruction, Monsieur Wenceslas ILBOUDO, l’Adjudant Marcel KAFANDO, Militaire au Régiment de Sécurité Présidentielle (RSP), était la seule personne inculpée dans cette affaire. C’est dans ce contexte que très curieusement, le 30 Mars 2015, l’information a été réouverte par le Parquet Général de la Cour d’Appel de OUAGADOUGOU en raison, semble-t-il, de charges nouvelles sur la base de pièces prétendument méconnues jusqu’alors dans la procédure ;
3. Nonobstant le fait qu’il n’est fait aucunement par le Gouvernement Burkinabè mention dans la procédure d’extradition de documents qui auraient été découverts au domicile de Monsieur Paul François COMPAORÉ, force est de constater que la procédure d’instruction ayant abouti à la demande d’extradition s’est fondée sur le témoignage d’un certain Monsieur Rodrigue YAMEOGO, lequel a été entendu pour la première fois par le Magistrat instructeur le 28 Juin 2018 après que celui-ci ait été contacté par un certain Maître Bâtis BENAO, Avocat de profession qui avait affirmé « qu’une personne vivant hors du Burkina Faso, précisément aux Etats-Unis d’Amérique, était entré en contact avec lui par ce qu’elle voulait faire une déposition dans le cadre de cette procédure. ».
Selon le témoignage de ce Monsieur Rodrigue YAMEOGO recueilli par le Juge d’Instruction de l’époque, Monsieur Emile ZERBO : « Alors que je vivais ici à Ouagadougou, je suis à un moment donné tombé malade et hospitalisé à la clinique SUKA. Par coïncidence, j’étais le voisin d’un malade qui passait le temps à crier tous les jours. Un soir, alors qu’il parlait à voix haute, je l’ai entendu dire à sa femme qui était avec lui qu’il regrettait d’avoir procédé à l’assassinat de Norbert ZONGO, que Paul François COMPAORÉE l’avait flatté pour le faire et que maintenant, ils sont en train de les tuer un à un. « (…).
Deux jours après ma sortie de l’Hôpital, il est décédé. Après tout cela, j’ai appris par les soldats du RSP proches de la famille de COMPAORÉ que le 12 Décembre 1998, la veille de l’assassinat de Norbert ZONGO, Marcel KAFANDO et Edmond KOAMA s’étaient rendus chez Paul François COMPAORÉ en l’absence de ce dernier mais en présence de son épouse et de sa belle-mère pour recevoir de l’argent. Ce sont ces éléments qui me font dire que Monsieur Paul François COMPAORÉ, ; son épouse et sa belle-mère sont impliqués dans cette affaire.
(…)
Question : Avez-vous déjà abordé avec « la fille de Marcel KAFANDO » ou un autre membre de sa famille.
Réponse : Non je n’ai jamais abordé ce problème avec elle. C’est plutôt son mari qui m’avait dit le jour de leurs fiançailles quand nous étions de retour de Yako vers Ouaga que c’est François COMPAORE qui payait les études de sa fiancée. Il a ajouté que cette dernière avait le numéro de Paul François COMPAORE et qu’elle l’appelait en cas de besoin.
Nous étions entre 2013 et 2014.
(…)
Question : Qui sont ces militaires qui vous ont déclaré que Marcel KAFANDO et Edmond KOAMA avaient reçu de l’argent au domicile de François COMPAORE la veille de l’assassinat de Norbert ZONGO ?
Réponse : Ce sont des militaires du régime de sécurité présidentielle (RSP) de l’époque.
Trois d’entre eux sont impliqués dans le putsch manqué du 15 Septembre 2015 et, parce que je les crois toujours dangereux je préfère ne pas donner leurs noms dans cette affaire. »
(S/C Audition de Monsieur Rodrigue YAMEOGO par le Juge d’Instruction Monsieur Emile ZERBO le 28 Juin 2018 Cf. Dossier de la Procédure d’instruction)
4. Or, contre toutes attentes, dans sa parution numéro 212 du 25 Septembre 2020 du Journal Bimensuel dénommé « Le Courrier Confidentiel » le même Monsieur Rodrigue YAMEOGO (qui avait témoigné et dont le témoignage a été capital dans la procédure d’extradition) a contacté ce bimensuel, « Le Courrier Confidentiel » avec « insistance » afin de livrer sa part de vérité.
« Il dit d’ailleurs avoir adressé une correspondance à plusieurs autorités judiciaires, en France et au Burkina Faso. Sa décision est prise : il se rétracte du dossier. La raison ? La voici : il affirme avoir signé, par le biais d’un juge, un « faux document » incriminant François COMPAORÉ, présenté, dans certains milieux, comme le commanditaire de l’assassinat de Norbert ZONGO et de ses compagnons, le 13 Décembre 1998.
Il y a aussi dit-il, une promesse de 50 Millions de Francs CFA qui lui aurait été faite mais qui n’a jamais été tenu. Selon ce journal Bimensuel n° 212 du 25 Septembre 2020, « nous avons décidé, au nom du sacro-saint principe de la liberté d’expression et de la liberté d’informer, de publier sa version des faits. Cependant, pour éviter d’incriminer certaines personnes citées dans l’interview, et pour ne pas nuire à l’instruction du dossier, nous avons supprimé quelques phrases et les avons remplacées par des points de suspension mis entre parenthèse. Rodrigue YAMEOGO aborde, sans détour, certaines questions brûlantes.
Plusieurs personnes devaient, dit-il, fournir au juge des informations compromettantes contre François COMPAORÉ. Un ex-officier qui a le grade de Général, a ainsi fourni certaines informations et tous ces propos ont été réunis dans un document sur lequel, j’ai apposé ma signature. C’est de ce document que je me rétracte aujourd’hui ». Et ce n’est pas tout… » dit le journal ;
(S/C Pièce Exemplaire du Journal Bimensuel N° 212 du 25 Septembre 2020)
5. A la lecture de cette interview du Sieur Didas Rodrigue YAMEOGO, il est indéniable que le témoignage initial du 28 Juin 2018 est, finalement et fondamentalement battu en brèche et par cette rétractation contenue dans le Journal N° 212 du 25 Septembre 2020 dénommé le « Courrier Confidentiel », toutes les charges initialement portées dans cette procédure d’instruction et celle subséquente de demande d’extradition seront caduques dès lors que Monsieur Didas Rodrigue YAMEOGO soutient lui-même dans ce journal lors de son interview que « à ce que je sache, je suis le seul témoin à charge contre François COMPAORÉ …ce que j’ai posé comme acte mérite châtiment et je suis conscient de mes actes ; c’est pourquoi je veux les réparer aujourd’hui. Je voudrais vous demander votre indulgence parce que je sais que ce n’est pas facile mais on ne saurait accuser quelqu’un à tort… »
(S/C Exemplaire du Journal Bimensuel « Courrier confidentiel » N° 212 du 25 Septembre 2020d
6. En tout état de cause, l’acte dont Monsieur Rodrigue YAMEOGO se prévaut et dont il précise qu’il « mérite châtiment » et dont « il a conscience » nécessite que la procédure d’extradition soit purement et simplement annulée parce que finalement elle est fondée sur des accusations mensongères ayant abouti à ladite procédure d’extradition viciée elle-même à la base et diligentée à l’encontre de Monsieur Paul François COMPAORÉ pour les infractions suivantes :
II. Moyens juridiques de droit sur la nullité de la procédure d’extradition pendante devant le Conseil d’Etat français :
Personne ne doit s’offusquer de ce que cette procédure doive être annulée pour la simple raison que Norbert ZONGO lui-même n’aurait pas été vraiment enchanté de voir les méthodes usitées pour lui rendre justice ! Dont acte !
Quoi qu’il en soit, aux termes des dispositions de l’article 261-10 du Nouveau Code de Procédure Pénale, « Toute personne qui se prétend lésée par un crime ou un délit peut, en portant plainte, se constituer partie civile devant le juge d’instruction qui dresse procès-verbal lorsque la plainte est verbale. Article 261-11 : La partie civile qui met en mouvement l’action publique doit, si elle n’a obtenu l’assistance judiciaire et sous peine de non-recevabilité de sa plainte, consigner au greffe la somme présumée nécessaire pour les frais de la procédure. Le juge d’instruction fixe la somme et le délai dans lequel celle-ci doit être consignée, par une ordonnance susceptible d’appel de la part de la partie civile.
L’article 261-12 du Code de Procédure Pénale précise en outre que : « Le juge d’instruction donne acte par procès-verbal de la présentation du reçu constatant le versement de la consignation fixée et de la constitution de partie civile ; il mentionne en outre le domicile élu par la partie civile dans le ressort du tribunal lorsqu’elle n’y réside pas. 40 A défaut d’élection de domicile, la partie civile ne peut opposer le défaut de signification des actes qui doivent lui être signifiés aux termes de la loi. A compter de sa constitution, la partie civile a le droit de se faire assister d’un avocat.
Par ailleurs, l’article 261-13 du même Nouveau Code de Procédure Pénale énonce que : « Le juge d’instruction communique la plainte et le procès-verbal établi conformément aux dispositions de l’article 261-12 ci-dessus, au procureur du Faso pour ses réquisitions. Le réquisitoire peut être pris contre personne dénommée ou contre personne non dénommée, notamment lorsque la plainte est insuffisamment motivée ou insuffisamment justifiée par les pièces produites.
Le procureur du Faso ne peut saisir le juge d’instruction de réquisitions de non informer que si, pour des causes affectant l’action publique elle-même, les faits ne peuvent légalement comporter une poursuite ou si, à supposer ces faits démontrés, ils ne peuvent admettre aucune qualification pénale. Dans le cas où le juge d’instruction passe outre, il doit statuer par une ordonnance motivée.
Enfin, aux termes des dispositions de l’article 261-14 du CPP, : « La constitution de partie civile peut également avoir lieu à tout moment au cours de l’instruction ; la partie civile qui ne réside pas dans le ressort du tribunal doit y faire élection de domicile dans l’acte de constitution, faute de quoi les dispositions de l’alinéa 2 de l’article 261-12 ci-dessus lui sont applicables. Dans tous les cas, la recevabilité de la constitution de partie civile peut être contestée soit par le ministère public, soit par le mis en examen, soit par une autre partie civile. Le juge d’instruction statue par ordonnance après communication du dossier au procureur du Faso ».
Enfin, aux termes des dispositions de l’article 335-7 du Code de Procédure Pénale : « Est puni d’un emprisonnement de six mois à cinq ans et d’une amende de cinq cent mille (500 000) à deux millions (2 000 000) de francs CFA, quiconque a sciemment, et par quelque moyen que ce soit, fait une dénonciation calomnieuse ou abusive des infractions prévues aux chapitres 1 à 4 du titre III du livre III du présent code, aux autorités compétentes, contre une ou plusieurs personnes ».
A. Sur la corruption, la subornation de témoin et le faux témoignage Art. 331-1, 374-6 et 374-1 du Nouveau Code Pénal :
Aux termes du Titre III, intitulé : De la corruption et des infractions assimilées chapitre 1 : De la corruption d’agents publics en son article 331-1 dispose que :
« Au sens du présent titre, on entend par :
˗ Agent public : • toute personne civile ou militaire qui détient un mandat législatif, exécutif, administratif, judiciaire, qu’elle soit nommée ou élue, à titre permanent ou temporaire, qu’elle soit rémunérée ou non et quel que soit son niveau hiérarchique ou son ancienneté ;
• toute autre personne civile ou militaire investie d’une fonction ou d’un mandat, même temporaire, rémunéré ou non et qui concourt, à ce titre, au service d’un organisme public ou d’une entreprise publique, ou de toute autre entreprise dans laquelle l’Etat détient tout ou partie de son capital, ou toute autre entreprise qui assure un service public » ;
L’article 331-2 du même Code précise : « Est puni d’une peine d’emprisonnement de deux ans à cinq ans et d’une amende égale au double de la valeur des promesses agréées, des avantages indus ou des choses reçues ou demandées sans que ladite amende soit inférieure à deux millions (2 000 000) de francs CFA :
˗ quiconque promet, offre ou accorde à un agent public, directement ou indirectement, un avantage indu, soit pour lui-même ou pour une autre personne ou entité, afin qu’il accomplisse ou s’abstienne d’accomplir un acte dans l’exercice de ses fonctions ;
˗ tout agent public qui sollicite ou accepte, directement ou indirectement, un avantage indu, pour lui-même ou pour une autre personne ou entité, afin d’accomplir ou de s’abstenir d’accomplir un acte relevant de ses fonctions.
Par ailleurs, s’agissant de la subornation de témoins, aux termes des dispositions de l’article 374-6 du Code pénal, « Commet le délit de subornation de témoin et est puni d’une peine d’emprisonnement de un an à cinq ans et d’une amende de un million (1 000 000) à dix millions (10 000 000) de francs CFA, quiconque en toute matière, en tout état de procédure ou en vue d’une demande ou d’une défense en justice, use de promesses, offres ou présents, de pressions, menaces, voies de fait, manœuvres ou artifices pour déterminer autrui à faire ou à délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation mensongère, que la subornation ait ou non produit effet, à moins que le fait ne constitue la complicité d’une des infractions plus graves prévues aux articles 374-2, 374-3, 374-4 et 374-5 ci-dessus. »
Dans ce journal du « Courrier Confidentiel », Monsieur Rodrigue YAMEOGO dit que « quand le juge m’a expliqué les faits, il m’a dit qu’il avait également une proposition à me faire « : « tu as la possibilité de te venger de Monsieur François COMPAORE en témoignant dans l’affaire Norbert ZONGO. Et en contrepartie, nous allons te donner cinquante Millions de Francs CFA. »
Et le journaliste du Courrier Confidentiel d’interroger : « Cinquante millions, dites-vous ?
Réponse : « Oui, cinquante millions de francs CFA. C’est ce qu’il m’a proposé si j’acceptais de témoigner contre François COMPAORE. Il m’a envoyé une lettre pour que je rentre à OUAGADOUGOU (document qu’il a présenté au journaliste). Monsieur Rodrigue YAMEOGO ajoute : « J’étais au Etats-Unis. Ils ont payé mon billet d’avion et réglé toutes les factures pendant mon séjour à OUAGADOUGOU. J’étais logé à l’Hôtel Palace et ce sont eux qui ont réglé les frais mais curieusement, ils ne m’ont jamais remis les Cinquante millions. Ils m’ont plutôt créé d’autres problèmes. Je devais repartir aux Etats Unis, mais c’était manifestement difficile ». Le Journaliste pose la question à Monsieur YAMEOGO pourquoi il est difficile ?
Monsieur Rodrigue YAMEOGO a répondu en ces termes : « Le juge m’a signifié qu’arriver en Belgique, de dire que je suis menacé, qu’on connaît mon adresse aux Etats-Unis et que si je me rends là-bas, on risque de m’assassiner. Donc il faisait référence sans doute aux hommes de François COMPAORE. Il m’a dit qu’en Belgique, de demander la protection internationale. C’est ce que j’ai fait, mon voyage s’est donc interrompu en Belgique. J’ai été gardé pendant deux mois dans un Centre de Rétention. Je précise qu’avant de quitter le Burkina je suis allé dire aurevoir à un ex-officier de l’armée qui a le grade de Général (…).
J’avais déjà participé à une rencontre avec lui, où il y avait également le Juge et d’autres personnes. Avant mon départ pour la Belgique, le Général a remis la somme de mille dollars à un ex-ambassadeur du Burkina au Sénégal. Mais de retour à l’Hôtel Palace, ce dernier m’a remis huit cents dollars et a gardé deux cents dollars en me disant que c’est pour s’approvisionner en carburant.
En Belgique, il fallait me trouver un Avocat et c’est dans ces huit cents dollars que j’ai extrait quatre cents dollars pour payer mon avocat. Je suis sorti du camp de rétention et je vivais en Belgique. Mais cela ne me plaisait pas vraiment. J’ai donc demandé à mon père de m’acheter un billet d’avion pour que je revienne au Burkina Faso » ;
Et le Journaliste du Courrier Confidentiel d’interroger Monsieur Rodrigue YAMEOGO en ces termes :
« Avez-vous contacté à votre retour, le juge en question ? »
Réponse de Monsieur Rodrigue YAMEOGO : « J’ai repris contact avec lui effectivement je me suis dis qu’en obtenant les cinquante millions, ça me permettrait de mieux m’organiser.
Et le journaliste d’interroger à nouveau Monsieur Rodrigue YAMEOGO : « Vous dites que vous étiez aux Etats-Unis au moment où la supposée proposition de cinquante millions vous a été faite. Comment, où, par quel procédé le juge a-t-il bien pu vous faire une telle proposition ? »
Réponse de Monsieur Rodrigue YAMEOGO : « Il est passé par l’un de mes cousins qui est avocat pour obtenir mon numéro de téléphone. Il m’a ensuite joint par téléphone et m’a fait la proposition. Je l’ai écouté, et j’ai accepté. D’abord par désir de vengeance contre Monsieur François COMPAORE qui m’aurait fait emprisonner. Ensuite, j’ai cédé à la tentation d’avoir des millions de francs CFA. Mais je ne savais pas en réalité qui j’avais en face de moi. Si je le savais, je n’aurais jamais accepté.
Le journaliste pose la question suivante à Monsieur Rodrigue YAMEOGO : « Et vous dites n’avoir jamais reçu les cinquante millions ?
Réponse de Monsieur Rodrigue YAMEOGO : « Je ne les ai jamais reçus ! Un jour, alors que je lui mettais la pression par rapport à l’argent promis, il m’a appelé un samedi pour dire qu’il voulait me voir. Nous nous sommes rencontrés devant CFAO. Il m’a remis deux cents milles francs CFA. Et il m’a dit d’arrêter de l’emmerder, sinon, il déposerait une plainte contre moi pour harcèlement et qu’il me mettrait en prison.
Je lui ai dit que je n’entendais pas me faire brimer une deuxième fois. Il faut que la vérité soit dite. Si je ne dis pas la vérité, je vais mourir en posant un acte qui n’est pas bien. Je ne veux pas mourir avec ce poids. Je ne veux pas être le bourreau de quelqu’un. Une chose m’intrigue dans cette affaire : Lorsqu’il m’a remis les 200 000 Francs, je me suis posé une question : D’où vient cet argent ? De son salaire ? Ou des cinquante millions qu’il m’avait promis ? C’est une question que je me pose……. »
Les faits tels que décrits par ce Monsieur, Didas Rodrigue YAMEOGO ne peuvent que conduire à l’annulation de la procédure ouverte devant le Juge d’Instruction du Cabinet n° 4 laquelle procédure a d’abord abouti à la réouverture d’une information judiciaire au cours de laquelle la procédure d’extradition a été formalisée par le Gouvernement du BURKINA FASO parce que plusieurs infractions pénales ont même été commises notamment de « corruption, de subornation de témoin et de faux témoignage, faits prévus et réprimés par les dispositions des articles 331-1, 374-6 et 374-1 du Nouveau Code Pénal ou toutes autres infractions que le Procureur du Faso ou le Magistrat instructeur auront décelées ;
En outre, la production de ce faux témoignage dans une procédure d’extradition caractérise les infractions d’escroquerie à la procédure d’extradition et de faux et usage de faux selon les dispositions des articles 613-1, 373-1 du Nouveau Code pénal ;
B. Sur l’escroquerie à la procédure d’extradition, le faux et l’usage de faux :
En effet, aux termes des dispositions de l’article 613-1 du Nouveau Code pénal burkinabè,
« Est coupable d’escroquerie quiconque, soit en faisant usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité, soit en abusant d’une qualité vraie, soit en employant des manœuvres frauduleuses pour tromper une personne physique ou morale et la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d’autrui, à remettre des fonds, des valeurs, des données informatiques ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge.
Par ailleurs, l’article 613-2 du même code précise le régime de la peine en disposant que :
« L’escroquerie est punie d’une peine d’emprisonnement de deux ans à cinq ans et d’une amende d’un million (1 000 000) à cinq millions (5 000 000) de francs CFA.
La peine est de cinq ans à dix ans d’emprisonnement et l’amende de trois millions (3 000 000) à quinze millions (15 000 000) de francs CFA lorsque l’escroquerie est commise :
˗ par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ou de sa mission ;
˗ par une personne qui prend indûment la qualité d’une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public ;
˗ par une personne ayant fait appel au public en vue de l’émission d’actions, obligations, bons, parts ou titres quelconques, soit d’une société, soit d’une entreprise commerciale ou industrielle ;
˗ par une personne qui fait appel au public en vue de l’émission de titres ou en vue de la collecte de fonds à des fins d’entraide humanitaire ou sociale ;
˗ par une personne utilisant un moyen de communication électronique ;
˗ au préjudice d’une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur. La peine d’emprisonnement est de sept ans à dix ans et l’amende de cinq millions (5 000 000) à trente millions (30 000 000) de francs CFA lorsque l’escroquerie est commise en bande organisée.
Dans tous les cas, la juridiction saisie peut prononcer l’interdiction d’exercice des droits civiques et/ou l’interdiction de séjour, pour une durée qui ne peut excéder cinq ans. La tentative des délits prévus par la présente section est punissable ».
Quant à l’article 373-1 du Code pénal, « Constitue un faux, toute altération frauduleuse de la vérité de nature à causer un préjudice et accomplie par quelque moyen que ce soit, dans un écrit ou tout autre support d’expression de la pensée qui a pour objet ou qui peut avoir pour effet d’établir la preuve d’un droit ou d’un fait ayant des conséquences juridiques ».
Aux termes des dispositions de l’article 373-8 du Nouveau Code pénal, « L’écriture publique est l’œuvre, ou est réputée être l’œuvre d’un agent public. L’agent public s’entend de toute personne civile ou militaire qui détient un mandat législatif, exécutif, administratif, judiciaire, qu’elle soit nommée ou élue, à titre permanent ou temporaire, qu’elle soit rémunérée ou non, et quel que soit son niveau hiérarchique ou son ancienneté ».
La production d’un tel faux témoignage de Monsieur Rodrigue YAMEOGO dans une procédure d’instruction sous-jacente et en soutien à une demande d’extradition de Monsieur Paul François COMPAORÉ caractérise indéniablement les infractions prévues aux dispositions des articles 373-1 et suivant du Nouveau Code pénal ;
C. Sur l’infraction de dénonciation calomnieuse :
Les faits tels que décrits par ce Monsieur Didas Rodrigue YAMEOGO sont également susceptibles de recevoir les qualifications pénales de « dénonciations calomnieuses » ;
En effet, aux termes des dispositions de l’article 335-7 du Code de Procédure pénale : « Est puni d’un emprisonnement de six mois à cinq ans et d’une amende de cinq cent mille (500 000) à deux millions (2 000 000) de francs CFA, quiconque a sciemment, et par quelque moyen que ce soit, fait une dénonciation calomnieuse ou abusive des infractions prévues aux chapitres 1 à 4 du titre III du livre III du présent code, aux autorités compétentes, contre une ou plusieurs personnes ».
Conclusion partielle :
Tous ceux qui critiquent à travers les médias la lenteur de la justice Burkinabè ou même française doivent avoir à l’esprit, que la justice n’est pas une course de vitesse ou de précipitation, mais bien au contraire une course de fond où la sérénité des Magistrats et la rigueur juridique doivent être de marbre, loin des opinions méchamment profanes qui se bâtissent d’ailleurs le plus souvent sur de faux postulats.
La mort de Norbert ZONGO ne doit jamais, nullement, servir de fonds de commerce pour quiconque et la justice doit suivre son cours sans cependant désigner de manière aveugle telle ou telle personne en raison ni de sa proximité, de son amitié ni encore moins de son inimitié ou de son hostilité avec l’homme de la presse dont la disparition a créé une onde de choc politique dans notre pays.
La justice doit lui être rendue mais pas dans des conditions ou des circonstances erronées parce que l’homme, Norbert lui-même ne l’aurait jamais accepté. Il ne saurait y avoir deux poids deux mesures pour la simple raison que dès la parution du Journal le « Courrier Confidentiel », le Procureur Général qui a réouvert cette information devait se saisir d’office pour ouvrir une autre information tendant à disculper Monsieur Paul François COMPAORE. A défaut personne ne devrait s’offusquer que l’on évoque l’idée un acharnement judiciaire à l’encontre de Monsieur Paul François COMPAORE. Ce qui n’est pas concevable dans un Etat de droit.
PS : Seul le chapeau de l’article a été rédigé par Lefaso.net
Fait à Ouagadougou, le 14 Décembre 2020.
Paul KÉRÉ
Docteur en Droit
Avocat à la Cour
Chevalier de l’Ordre National
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