DETOURNEMENT DE VOIX D’ELECTEURS : Assibo Ouédraogo, le burkinabè qui a trahi le voltaïque
L’Union pour le progrès et le changement (UPC) y croyait certainement dur,
lorsqu’invitant la presse aux lendemains de la reprise partielle des élections
municipales complémentaires du 17 février 2013, elle annonçait qu’elle
conservait l’arrondissement numéro 5 de la ville de Ouagadougou…
A l’évidence c’était méconnaître les mœurs politiciennes de certains acteurs
locaux, qui sont prêts à tout pour faire prévaloir leurs intérêts personnels au
détriment du respect des règles démocratiques.
Alchimie électorale
Le journaliste de la TNB ne s’y est pas trompé lorsqu’ouvrant son ‘’JT’’ de
20 heures, il a parlé en des termes très précis d’ « alchimie » pour qualifier
les événements du côté de Bogodogo. Car c’est bien de cela qu’il s’agit.
Un retournement de situation qui n’est pourtant pas à l’honneur de notre
jeune démocratie. Et Assibo Ouédraogo, le conseiller qui a trahi ses anciens
compagnons de l’UPC, mais surtout ses électeurs, n’en sortira pas avec les
honneurs.
Bien au contraire, son geste n’a pas volé haut dans le ciel électoral du
Burkina. Du reste, le flot de critiques qui s’abattent sur lui en ce moment, est
à la hauteur de l’extrême légèreté avec laquelle il a abordé son sujet. Lui qui
a préféré faire fi de toutes considérations, alors même qu’il avait la
possibilité de faire avancer la roue de l’histoire dans la bonne direction.
Assurément, il faut croire qu’au Burkina, il y a plus un problème d’Hommes
sérieux et crédibles que d’institutions. Encore que ce sont les Hommes eux-mêmes
qui font les institutions.
Tentatives d’explications
Selon nos sources, Assibo Ouédraogo est arrivé le jour du vote avec la
délégation du CDP. Deux jours auparavant, il était resté injoignable selon les
autres conseillers UPC. Et pour couronner cette mise en scène pathétique, il
sera le dernier à faire son entrée dans la salle. Dès lors le scénario de la
messe était réécrit.
A la question de savoir ce qui s’est passé pour qu’il fasse basculer
l’équilibre de 10 contre 9 en faveur du CDP, il aurait simplement répondu avoir
voté selon ses convenances personnelles.
Les limites du scrutin indirect
Au CDP, cette victoire a un goût amer. Et l’on tente de la justifier par le
fait que ce ne serait-là qu’une simple continuité par rapport à ce qui s’est
passé dans d’autres communes du Burkina. Un raccourci simpliste qui aura du mal
à convaincre.
Car si un parti politique peut s’allier à un autre pour conserver une mairie,
il est difficilement admissible par contre qu’un conseiller élu sous la bannière
d’un parti politique et dans le cadre d’un scrutin de liste, aille donner sa
voix à une formation politique autre que celle avec laquelle il a battu
campagne. Au mépris des citoyens qui lui ont accordé leur confiance.
Cette perversion des règles démocratiques dans laquelle on peut troquer son
mandat contre une mobylette ou des billets de banque voire une promesse ou une
parcelle est dangereuse. Car elle peut semer les germes de la violence.
Au-delà même de la relecture du code électoral envisagée par endroit comme la
panacée absolue à ce déficit de citoyenneté, c’est donc une question de bon sens
élémentaire et de respect de l’électeur qui se pose. Et l’on a peut-être là un
début de réponse à la désaffection des citoyens burkinabè pour la chose
politique !
Mairie ou caverne d’Ali Baba ?
Faut-il croire au vu des événements actuels que l’arrondissement numéro 5 de
Ouagadougou cache effectivement des secrets que certains individus auraient peur
de voir révélés à la face de l’opinion publique ? En tout état de cause, cette
volonté léonine de ne pas le laisser échoir entre les mains de l’opposition,
malgré la volonté clairement exprimée par les électeurs dans les urnes, ne fait
que renforcer les suspicions autour de cette mairie.
En attendant, c’est la jurisprudence Assibo qui vient d’être écrite au
Burkina. Mais on s’en doute assez aisément, de la plus mauvaise des
manières.
Juvénal SOME
Lefaso.net
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