Français et Maliens s'emparent de Gao, bastion islamiste dans le Nord du Mali
Soldats français et maliens se sont emparés samedi du bastion islamiste de Gao, la principale ville du Nord du Mali, marquant un tournant majeur dans la lutte contre les groupes islamistes armés, au seizième jour de l'intervention militaire française dans le pays.
"Les forces maliennes et françaises libèrent Gao", a annoncé le ministère français de la Défense, dans un communiqué, précisant que des membres des forces spéciales s'étaient emparés dans la nuit de l'aéroport et d'un pont stratégique à Gao, à 1.200 km au nord-est de Bamako.
"Dès ce soir, Sadou Diallo, le maire de Gao réfugié à Bamako, a pu regagner sa ville accompagné par le colonel (Didier) Dacko", commandant les troupes maliennes sur le terrain, a précisé le ministère.
Paris a précisé que des contingents africains, formés de militaires nigériens et tchadiens, arrivaient sur zone pour prendre le relais des forces françaises.
"Les forces françaises et africaines maîtrisent à 100% la ville de Gao. Il y a une liesse populaire, tout le monde est content", a indiqué une source de sécurité malienne. Mais de premiers témoignages font aussi état d'actes de pillage.
Les soldats nigériens et tchadiens sont venus par la voie des airs, depuis Niamey. Ils étaient accompagnés de soldats maliens du colonel Alhaji Ag Gamou, qui étaient réfugiés au Niger depuis l'an dernier, après la débâcle face aux groupes armés, selon une source malienne de sécurité sur place.
"Il n'y a pas de combat à proprement parler" dans la région de Gao, selon un porte-parole de l'état-major français, "mais sporadiquement, des opérations de harcèlement avec des éléments terroristes qui ouvrent le feu sur nos positions après s'être abrités dans des zones urbaines".
L'entourage du ministre de la Défense français a jugé par ailleurs "plausible" le bilan de quelques centaines de combattants islamistes tués depuis le début de l'intervention française au Mali donné par le quotidien français Le Monde, citant des sources militaires.
Les positions des islamistes à Gao ont été à plusieurs reprises pilonnées par l'aviation française. Gao était un bastion des islamistes du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao), qui y ont commis de nombreuses exactions, dont des amputations de personnes accusées de vol.
Refus des "logiques de chantage"
C'est ce groupe qui a dit samedi à l'AFP vouloir négocier la libération d'un otage français qu'il détient depuis deux mois.
"Le Mujao est prêt à négocier la libération de l'otage Gilberto", a déclaré Walid Abu Sarhaoui, porte-parole du Mujao, en référence au Français Gilberto Rodriguez Leal, enlevé en novembre 2012 dans l'Ouest du Mali.
Le Premier ministre français Jean-Marc Ayrault a répondu en refusant "les logiques de chantage". "La France fera tout pour leur liberté", a-t-il ajouté, en évoquant les sept otages français au Sahel.
Interrogé pour savoir si cette volonté affichée de négociation était liée à l'intervention militaire française, le porte-parole du Mujao a simplement répondu: "Nous voulons négocier. Pour la guerre, entre musulmans, nous pouvons nous comprendre", sans autre précision.
Une déclaration qui peut être interprétée comme une ouverture pour des négociations avec Bamako et qui survient deux jours après l'annonce d'une scission au sein d'Ansar Dine (Défenseurs de l'islam), un autre des groupes islamistes du Nord du Mali.
Parallèlement à la prise de Gao, une colonne de militaires tchadiens et nigériens, qui étaient stationnés au Niger, faisait route samedi après-midi vers la frontière malienne, située à une centaine de kilomètres au nord.
La France s'est engagée depuis le 11 janvier au côté de ce qui reste de l'armée malienne, contre les islamistes armés, pilonnant leurs colonnes de pick-up et leurs bases arrière, afin d'empêcher leur progression vers le Sud et la capitale Bamako.
Les villes de Konna et Douentza (centre) ont été reprises par les soldats français et maliens, qui ont également repris vendredi le contrôle d'une localité du Nord, Hombori, à 920 km au nord-est de Bamako et à quelques 200 km de Gao.
Une autre colonne franco-malienne, après avoir pris le contrôle de Diabali (ouest), progresse vers Léré, plus au nord, avec pour objectif la ville-phare de l'islam en Afrique, Tombouctou, à 900 km au nord-est de Bamako.
Jean-Marc Ayrault a d'ailleurs indiqué que les "troupes françaises et maliennes" seraient "bientôt près de Tombouctou". Il a aussi répété que la France "n'avait pas vocation à rester, bien entendu" au Mali.
Les islamistes ont riposté à cette progression en dynamitant vendredi un pont stratégique près de la frontière nigérienne, sur une des deux routes que pourraient emprunter les soldats tchadiens venus du Niger.
De leur côté, les chefs d'état-major ouest-africains, réunis samedi en urgence à Abidjan, ont décidé de "relever" le volume de leurs effectifs promis au Mali, pour qu'ils atteignent "5.700 hommes".
Jusque-là, l'Afrique de l'Ouest visait le déploiement d'environ 4.000 militaires. Le Tchad a séparément promis plus de 2.000 soldats.
Au total, autour de 2.000 soldats africains sont d'ores et déjà stationnés au Mali ou au Niger voisin. Leur déploiement est ralenti par de sérieux problèmes de financement et de logistique pour les pays contributeurs.
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