En effet bien qu’étant relativement jeune dans le paysage médiatique des quotidiens, ce journal bat déjà le record des atteintes à la loi, à l’éthique et à la déontologie constatés dans les journaux par l’institution. Sa particularité réside dans son orientation vers le sensationnel et le fait divers, caractérisée par la publication intempestive d’images choquantes et violentes à sa ?Une ? et dans ses pages intérieures, ainsi que de nombreuses violations du droit à l’image des citoyens, notamment des enfants.
Durant l’année 2012, le Conseil supérieur de la communication a adressé deux (02) lettres d’observation au Directeur de Publication pour attirer son attention sur l’irrégularité de cette pratique tout en l’appelant à plus de professionnalisme. Au cours de la même année, l’intéressé a été auditionné deux fois suite à la publication des images macabres des victimes des affrontements de Guénon dans le Nahouri, et d’un article portant atteinte à la vie privée d’un couple.
De nombreuses autres entorses portant atteinte à l’image de la personne ou à la publication d’images violentes et insoutenables - sans compter d’autres formes d’atteintes à la loi, à l’éthique et à la déontologie professionnelle - ont été relevées dans les colonnes de ce journal, à travers le monitoring courant des médias, réalisé par les services techniques du CSC.
On note, entre autres, les cas suivants :
l’image de la dépouille à l’air libre d’un veilleur de nuit assassiné par des bandits à son lieu de travail paru dans la livraison n°486 du 07 mars 2012 ;
la photo d’une main coupée à la ?Une ? de l’édition n° 544 du 01 juin 2012 en guise d’illustration à un article sur la charia au Mali ;
la photo de blessures profondes sur le sein et le bras gauche d’une dame dans la livraison n° 622 du 24 octobre 2012 ;
plusieurs photos d’enfants et de prévenus à visages découverts ;
la publication récente (26 novembre 2012) à la ?Une ? de l’image d’une victime brûlée au 3ème degré à côté de deux motos calcinées.
Au regard de ces observations courantes et du caractère récidiviste du journal « Le Quotidien », le Collège des Conseillers, au terme de ses délibérations du 04 décembre 2012, a conclu que son approche pédagogique à son égard a atteint ses limites. Ainsi, devant impérativement et pleinement jouer son rôle de régulation des médias conformément à loi, le Conseil supérieur de la communication a décidé cette fois-ci de passer à une étape supérieure de sanction, à savoir une suspension de parution d’une semaine, en vertu de ses prérogatives en la matière stipulées à l’article 35 de la loi n°028-2005 / AN du 14 juin 2005 portant création, composition, attributions et fonctionnement du Conseil supérieur de la communication. Cet article stipule que : « Dans le cadre de l’exécution de ses missions, le Conseil supérieur de la communication prononce, en fonction de la gravité du manquement, une des sanctions suivantes : 1) la mise en demeure adressée au directeur de l’organe concerné ; 2) la suspension de la publication ou d’une partie du programme pour un mois au plus ; 3) la suspension de la publication ou d’une partie du programme pour trois mois au plus ; 4) la suspension définitive de la publication ou le retrait de l’autorisation ».
La gravité des manquements constatés tient à leur caractère récurrent qui atteste du peu d’égard que le Directeur de Publication du journal « Le Quotidien » a pour l’autorité et les observations de l’institution.
Il est à noter que c’est la première fois, depuis sa création, que le Conseil supérieur de la communication prend une sanction d’un tel niveau vis-à-vis de la presse écrite.
En le faisant, le CSC entend rappeler aux médias le rôle qui est le leur, à savoir, la publication ou la diffusion d’une information saine et respectueuse de la loi et des règles d’éthique et de déontologie professionnelle.
Partisan de la dépénalisation des délits de presse et gardien de la liberté de presse, le Conseil supérieur de la communication estime que les seules garanties pour faire de ces principes une réalité consiste, pour les médias, à mettre l’intérêt du public au centre de leurs activités, au-delà de la recherche du sensationnel et du profit mercantile.
Fait à Ouagadougou, le 13 décembre 2012
Béatrice DAMIBA
Commandeur de l’Ordre National